Qu’ils soient en France ou ailleurs, les travailleurs disposent de droits en cas de pandémie, dont parfois celui de désobéir.

  • Le droit d’être rapatrié et le droit de refuser le rapatriement

De nombreuses entreprises françaises sont implantées en Chine, et notamment à Wuhan, berceau de l’épidémie et bassin industriel. Très rapidement, le groupe PSA, qui compte trois usines sur place, a opté pour l’application d’un « principe de précaution maximal », en rapatriant 15 salarié.e.s et leurs familles.

Quel sort cependant pour les collaborateurs qui seraient encore sur place ? Pour Maître Ballu-Gougeon, « il n’y a pas de question à se poser »« Le rapatriement est organisé par l’Etat français, et l’employeur doit informer les salarié.e.s de cette possibilité et des modalités. Si le/la salarié.e n’a pas pu embarquer par un de ces vols, l’employeur doit organiser le rapatriement ».

A noter cependant que si les collaborateurs en détachement doivent suivre les instructions , il n’en va pas de même pour les expatriés, puisqu’il n’y a pas de lien de subordination dans ce statut.

Quoi qu’il en soit, les salarié.e.s de retour en France connaissent ensuite un sort particulier. Ils font d’abord l’objet d’une mesure de confinement de 14 jours, comme c’est le cas pour les derniers rapatriés en provenance de Wuhan, qui sont isolés dans un centre de vacances à Branville (Calvados) depuis le 21 février dernier.  

Durant cette période, et en cas d’arrêt maladie, le confinement leur ouvre droit, de façon tout à fait exceptionnelle, à la perception des indemnités journalières de la sécurité sociale, sans délai de carence, et sans remplir les conditions habituelles (décret du 31 janvier dernier). En cas de poursuite de l’activité professionnelle, l’employeur peut sans surprise imposer le télétravail.

Les entreprises, à l’issue de cette période, doivent ensuite imaginer une solution transitoire pour les collaborateurs rapatriés, en leur proposant un poste équivalent sur le territoire, dans l’attente de la reprise de leur mission.

  • Droit de retrait et refus de voyager en Chine

L’article L 4131-1 du code du travail reconnaît à chaque travailleur le droit de se retirer de toute situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un « danger grave ou imminent pour sa vie ou sa santé ».  Au regard des chiffres relatifs à la contamination et aux décès en Chine, tout porte à croire que les critères sont remplis, auquel cas le/la salarié.e ne pourrait subir ni sanction ni retenue de salaire.

Cela semble d’autant plus vraisemblable que le gouvernement déconseille fortement les départs vers la Chine. 

Maître Ballu-Gougeon invite en tout état de cause à la plus grande prudence : « Les entreprises doivent dans tous les cas suivre attentivement les recommandations du consulat et du Ministère des affaires étrangères, et s’adapter. »

Il n’est d’ailleurs pas exclu que le gouvernement s’adresse ultérieurement aux employeurs de façon plus spécifique, comme elle l’avait fait pour la pandémie grippale via une circulaire du 3 juillet 2009. A l’époque, l’Etat avait adopté une démarche pédagogique en abordant l’ensemble des questionnements (port du masque, aménagement du travail, rôle du médecin du travail, clés pour construire un plan de continuité d’activité par exemple), tout en invitant les entreprises à prendre l’attache de l’administration pour obtenir davantage d’informations.

Article rédigé par Delphine Poirier pour Welcome to the jungle